Choses qu’on veut faire après le confinement

Un grand repas dans le jardin familial

Serrer ses proches dans ses bras

Une grillade avec les amis

Aller ensemble quelque part (ailleurs)

La tournée des terrasses 

Reprendre la grimpe

Un voyage en train

Baignade et bronzette sur la pelouse de Cully ou de Paudex

Choses qu’on ne veut plus faire après le confinement

Porter à nouveau un soutien-gorge

S’arrêter avec consternation devant les rayons de PQ vides

Subir les regards méfiants des passants

Choses qu’on veut garder du confinement

Prendre soin de ses plantes

Les poèmes qu’on a appris par coeur

Appeler plus souvent ses grands-mères

Ecrire régulièrement

Essayer des recettes qu’on croyait hors de notre portée

Prendre le temps

L’envie de faire des projets et de les réaliser

Soutenir les commerçants locaux

Le souvenir de cette expérience

Louise B.

Choses bizarres

Ce matin, j’ai mis un carré de savon violet 100% labellisé marseillais, senteur lavande dans la savonnière du lavabo.

Le carré est si gros que je frotte mes mains l’une après l’autre pour asphyxier l’hypothétique Covid-19. 

P. avait acheté 12 savons similaires chez l’Empereur à Marseille. J’avais trouvé cet achat compulsif débile et m’étais fait la réflexion que nous aurions besoin de plusieurs vies pour les utiliser.

D’autant plus que nous les avions portés à bout de bras dans nos valises. Un carré est-il égal à un kilo ?

Et je les avais répartis comme antimites au milieu de mes habits, comme œuvres d’art sur ma bibliothèque et naturellement offerts à quelques amis. Mais ils sont si gros ces fichus carrés.

On dit tant de choses sur la propagation du virus mais un seul consensus : il n’y a pas mieux que le savon contre le virus.

Pourquoi diable, les gens se jettent-ils alors sur les réserves de papier-cul et non pas sur les savons ? 

La pénurie de savon n’existerait-elle pas ?

On se souvient que les nazis récupéraient les os de leurs victimes pour en faire du savon.

Un simple carré de savon violet.

Carine B.

Chose lyrique

Une fois, devant la COOP, au moment de me désinfecter les mains, je croise le directeur d’un opéra de ma ville natale.

Comme il n’y a pas d’autres clients, on se salue à distance.

Comment allez-vous ? Je demande. Je ne comprends pas sa réponse car il y a trop de mots qui se bousculent.

Et vos proches ? Je demande ensuite

De quelles proches parlez-vous me crie-t-il. Ils sont tous morts.

Et vos collègues et l’opéra ?

Je vous le dis, tout est stoppé avant qu’ils aient trouvé un vaccin. Jamais ils n’autoriseront un rassemblement de plus de 20 personnes.

Et il marmonne encore et encore mais je ne comprends plus rien.

Je n’ai pas osé demander qui étaient les « ils ».

Grace L.

Choses vues – mon quartier pas à pas

Descendre le chemin de Chandolin.  Je longe des petits châteaux, de belles maisons bourgeoises pour m’écraser sur un locatif saumon pâle. Le chemin de Chandolin c’est l’illustration du déclassement social, cher à Eribon.  Je me souviens de la maison de mon enfance à l’avenue du Grammont 2 : un appartement banal dans un immeuble laid au milieu de splendides bâtisses. De la fenêtre de la chambre que je partageais avec mon frère, j’imaginais ces vies hors du commun dans des six pièces classés. Ma vengeance : nos voisins nantis avaient vue sur notre médiocrité.

 

Lire sur un immense drap pendu à une fenêtre de la rue Sainte-Beuve : « Le savoir est le plus intellectuel des virus. Dommage qu’il ne soit pas très contagieux ».
 
Carine B.

Choses qui font plaisir

Gratter la terre et accueillir le printemps
Imaginer les couleurs, laisser jaillir les idées, suivre sa première intuition
Jouer aux cartes, perdre, s’agacer, accepter, espérer, perdre à nouveau
Observer le cerisier et attendre qu’il débute sa danse avec le printemps
Cuisiner, partager, rire, découvrir l’autre, questionner, se questionner
Rester en équilibre sur un pied et pas sur deux pour avancer
 
Ania G.

Choses qui font peur

 
Être loin de ses proches ou plutôt des gens que l’on aime
Et après?
L’armée dans les rues
La peur des autres
 
Ania G.

La mort (un peu plus que d’habitude)
Les conséquences sociales, politiques et économiques
La perspective de l’annulation de l’année scolaire
Transmettre la maladie et être responsable de la souffrance des autres
 
Louise B.

 
Quand va-t-on sortir de ce confinement ?
Vais-je perdre des êtres aimés ?
Vais-je revoir mon grand-papa en vrai ?
Les choses vont-elles mal tourner pour moi ?
Comment seront les gens en sortant de cette crise ?
Le monde va-t-il s’en remettre et pourra-t-on toujours faire les mêmes choses ?
Vais-je pouvoir toujours aller dans certains de mes endroits favoris ou seront-il fermés ?
 
Matthieu J.

Choses professionnelles

Le télé-travail – Dans le confinement c’est le buste qui compte !
Comment paraître au mieux dans les vidéo conférences ?
Devenez metteur en scène :
Prenez garde à l’arrière-plan : la bibliothèque ou le tableau c’est mieux que le linge qui pend ou la pile de jouets entassés. Exercez-vous à prendre la pose, soyez attentif à l’éclairage. Relevez le menton. Aujourd’hui, les interactions professionnelles se font au travers d’hommes et de femmes tronc !
 
Carine B.

Choses qui sont les mêmes quand on est confiné

Faire l’amour, avoir soif, avoir faim, se laver, se soulager, rire, pleurer
Mes peurs, mes doutes et mes questions incessantes
Les gens que j’aime ou peut-être ne sont-ils plus les mêmes?
Le goût du café
La pluie

 
Ania G.

Choses qui sont différentes quand on est confiné

Se réinventer, imaginer un autre quotidien, s’inventer et expérimenter ce nouveau quotidien
Observer ses voisins, écouter les chiens seuls occupants des rues, attendre le chant des oiseaux (en particulier la tourterelle sur le cerisier qui roucoule à la recherche de sa partenaire?)
Dormir plus longtemps, raconter ses rêves tranquillement sans scruter le temps qui file
Jouir de quelques jours de bonheur partagé avec ses amis dans sa propre maison
 
Ania G.

 
Le rayon de nos trajets quotidiens
Le réveil, qui ne dépend plus d’un horaire imposé
La compulsion à regarder les informations à tout moment
La vitesse du temps
Le ratio réel / virtuel de nos contacts
La compagnie
Les muscles et les endroits qui font mal
Les causes de la fatigue
La présence du silence
Notre voix (et ce qu’on en fait)
La solitude mais la solidarité aussi
Les sorties culturelles qui restent à la maison
 
Louise B.